Histoire Les portraits royaux adresse La Genèse du portrait de Henri III
 
Pour citer cet article : Alexandra Zvereva, « Il n’y a rien qui touche guères le cœur des simples personnes que les effigies de leurs princes et seigneurs ” : la genèse du portrait de Henri III », in Isabelle de Conihout, Jean-François Maillard et Guy Poirier (dir.), Henri III mécène des arts, des sciences et des lettres, Paris, PUPS, 2006, pp. 56-65. Article mis en ligne le 4 janvier 2009 (http://www.portrait-renaissance.fr/histoire/publication_302.html).
Henri de France, duc d'Anjou
D'après l'Anonyme Lécurieux,
Henri III
, vers 1572,
Chantilly, musée Condé.

École française,
Henri III, fin du XVIe siècle, Chantilly, musée Condé.

D'après Étienne Dumonstier
ou Jean Decourt, Henri III,
Paris, musée du Louvre.

Jean Wierix,
Henri III
, 1588,
Paris, BnF, Cabinet des Estampes.
ans une lettre à son maître datée du 20 février 1577, Vigenère, secrétaire du conseil du duc de Nevers, évoquait les portraits gravés de Louis de Gonzague et de son épouse destinés à l’opuscule qui célébrait leur fondation de 1573 pour marier chaque année, dans leurs terres et seigneuries, soixante « pauvres filles ». Ne trouvant pas ces portraits réussis, le secrétaire demandait l’opinion du duc sur le sujet en lui envoyant les épreuves, jugeant qu’une bonne représentation des deux fondateurs était indispensable à la publication :
 
« Car, comme vous scavez, Monseigneur, il n’y a rien qui touche guères le cœur des simples personnes que les effigies de leurs princes et seigneurs, lesquelles estans recongneues par ceux qui sont présentement en vie, ilz en laissent de main en main la memoire à leur postérité, si d’aventure ilz les veoient bien faittes et les honorent et les benissent, là où, si elles ne ressemblent point ou si elles sont faittes de quelque mauvaise main, ilz les resnient et desdaignent[1]. »
   L’importance d’un portrait princier ne semble jamais être aussi grande qu’en cette fin de XVIe siècle, sous le règne de Henri III. Grâce à la multiplication des portraits peints et gravés du roi de France, le tableau et l’estampe prennent le pas sur la médaille et la pièce de monnaie, principaux porteurs de l’image royale officielle depuis Louis XII[2]. Dans les galeries, comme dans les recueils gravés des hommes illustres, sur les frontispices des livres dédiés au roi Très Chrétien, on trouve désormais partout un portrait du monarque « au vif », différent de l’image au profil standardisée et sacralisée des testons. Un critère essentiel entre alors en jeu : la ressemblance qui ne relève pas de la qualité artistique, puisqu’il s’agit surtout de bien peindre les « véritables traits » du roi.
   Le pouvoir du portrait est considérable, le peuple vénérant et glorifiant son prince dont il voit un portrait « bien fait ». Les conséquences d’un portrait exécuté par « quelque mauvaise main » sont désastreuses : les « fidèles et loyaux serviteurs » vont jusqu’à renier l’image de leur souverain ! Le portrait abrite une force mystérieuse, mais évidente, même pour les spectateurs ordinaires, qui permet non seulement de reconnaître, mais aussi de connaître les qualités intérieures de la personne. Une représentation officielle du roi largement diffusée offre, dans un contexte de grave crise du pouvoir monarchique, l’occasion de populariser son image et de transmettre un message aux sujets fidèles ou rebelles, voire de retrouver le prestige d’autrefois.
   L’image de Henri III est aussi présente dans nos mémoires que celle de François Ier, son grand-père, ou de Henri IV, son heureux successeur. Le roi y porte un habit noir à col plat blanc sur lequel se détache le cordon bleu de l’ordre du Saint-Esprit ; il est coiffé d’une petite toque dite à tort « à la polonaise » ornée d’une aigrette de pierreries et d’une plume[3]. Beaucoup se sont étonnés de la différence notable entre cette image calme et accueillante et le cliché d’un roi efféminé, extravagamment vêtu, apeuré, pieux, le « plus faible et le plus malheureux des rois[4] » ? D’où provient ce contraste et pourquoi le portrait de Henri III n’est-il pas censé refléter le visage du roi tel qu’on se l’imagine et qu’on s’attend à le voir ?
   Plusieurs chercheurs ont effectivement tenté de décrire ce portrait du roi selon leur perception, plus ou moins hostile, du dernier des Valois. Gaston Dodu y voyait « une physionomie usée et rusée », un « œil oblique » ; Josèphe Jacquiot décrivait la bouche qui « dénote un sentiment de mépris, teinté de lassitude », le regard « inquiétant, à la fois fuyant et cynique, chargé de duplicité et de perspicacité[5] ». Cependant, une fois la légende noire écartée, le portrait présente un roi sage et vertueux, intelligent et observateur. Ainsi, la question se pose de l’implication de Henri III dans la création de sa propre image officielle et de la perception de cette image par ses contemporains, à une époque où dominent artifice, tromperie et duplicité. On peut en effet parler de « Henri III imaginaire », pour reprendre le titre de l’étude d’Anne-Marie Lecoq sur François Ier, à condition toutefois d’en excepter l’aspect allégorique. Simplifié à l’extrême, le portrait officiel de cette époque est dépourvu du moindre symbole mythologique, du moindre renvoi aux textes sacrés ou philosophiques, sans aucune métaphore, emblème, devise ou signe propice à l’interprétation. Pour étudier le portrait officiel de Henri III et comprendre le discours du roi adressé à ses sujets, il est nécessaire de retracer sa genèse et de le restituer dans l’histoire du portrait royal en France.
   Le premier portrait royal indépendant connu est celui de Jean le Bon exécuté vers 1360 par un artiste anonyme[6]. Le roi est représenté de profil et ses traits sont fortement individualisés. L’habit est rudimentaire et le souverain ne porte aucune insigne de son pouvoir. Le seul fait qu’il portraituré suffit à démontrer sa royauté, bien que les dimensions du tableau (soixante sur quarante centimètres) et l’utilisation d’un fond doré renvoient aux images sacrées et confèrent un caractère intemporel à l’image du roi, renforcé par l’inscription en lettres gothiques « jehan roy defrance ».
   Au milieu du XVe siècle la tradition du portrait royal est définitivement établie et une nouvelle page s’ouvre avec le portrait de Charles VII[7], exécuté par Jean Fouquet vers 1460 à l’époque précise où s’achève la guerre de cent ans et que s’affermit l’autorité royale. Influencé par l’Ars nova flamand et par Jan Van Eyck, Fouquet renonce au profil qui sera encore longtemps utilisé par les peintres italiens, du moins pour les portraits indépendants. Il emploie pour le portrait du roi la présentation à mi-corps et la position de trois-quarts du modèle, qui rendait mieux que le profil linéaire et abstrait les particularités du visage montré en volume. Fouquet confère au portrait du roi une monumentalité majestueuse, tout en rendant avec un réalisme frappant et presque cruel des traits sans beauté et une expression désenchantée, et affirme la puissance par une forte géométrisation de la silhouette presque grandeur nature, la pose, le regard, le cadrage.
   L’œuvre de Fouquet constitue un véritable prototype du portrait royal officiel, repris pour les représentations des successeurs de Charles VII, seul Louis XI semblant avoir préféré l’ancienne formule du portrait de profil[8], alors même que Fouquet restait à son service et qu’un portrait de trois-quarts du roi a sans doute été exécuté. Même si le cadrage privilégié était désormais celui du petit buste et non à mi-corps, la composition trouvée par Fouquet reste étonnamment stable jusqu’au règne de Henri III. À la différence des monarques des pays voisins, les rois de France se montrent dépourvus des attributs du pouvoir, couronne, sceptre ou main de justice, qui permettraient de distinguer le souverain d’une autre personne de haut rang[9]. Le collier de Saint-Michel présent dans tous les portraits royaux depuis la fondation de l’ordre par Louis XI en août 1469, est exactement le même que celui des « frères et compagnons de l’ordre ». L’image du souverain est perçue en tant que telle comme un insigne de son pouvoir et de son autorité de gouverner les hommes. Image de la personne publique du prince et de sa fonction, elle ne représente pas l’homme, mais le roi, son principe immortel et non son enveloppe périssable. Malgré le physique malingre et peu attrayant de Charles VIII et de Louis XII, leurs visages sur les portraits exécutés par Jean Perréal reflètent les qualités d’un roi chrétien : l’autorité, la justice, la foi, la vertu, la gloire et l’exemplarité[10].
   La situation change radicalement avec l’avènement de François Ier. Collectionneur passionné d’œuvres d’art italien, mais en même temps grand amateur de portraits français, il commande de nombreuses représentations de gentilshommes et dames de sa cour à son peintre attitré Jean Clouet. Alors que les nobles et les hauts dignitaires de l’État se faisaient jusqu’alors toujours représenter, suivant la tradition médiévale, en donateurs en prière, la forme de représentation réservée aux souverains devient accessible à une nouvelle société de courtisans, descendants de grandes familles nobles attachées à la maison royale. Seul le visage du roi de France le différencie désormais de ses sujets : plein de grandeur et de noblesse, il est surtout facilement reconnaissable et ne change guère avec l’âge. La personnalité et la figure de François Ier convenaient parfaitement à ce changement : très grand, beau, majestueux, brillant et autoritaire, il est le premier des gentilshommes, mais aucun d’eux n’est son égal. Les ambassadeurs vénitiens parlent en même temps de sa familiarité (« [...] sa Majesté manquait absolument de toute solennité et cérémonie[11] ») et de son incroyable prestance. En 1546, alors que le roi est âgé et malade, l’ambassadeur Marino Cavalli est étonné par son apparence : « le roi est maintenant âgé de cinquante-quatre ans : son aspect est tout à fait royal, en sorte que sans avoir jamais vu sa figure ni son portrait, à le regarder seulement, on dirait aussitôt : C’est le roi[12]. »
   Le premier portrait connu de François Ier et exécuté à son avènement, dont une réplique est conservée à Chantilly, reprend la formule traditionnelle[13], mais les portraits ultérieurs, y compris le grand portrait de 1524, introduisent une modification notable : le regard du roi, vif et direct, est tourné vers le spectateur. En outre, dans le portrait du Louvre, qui s’inspire sans doute directement de celui de Charles VII, la somptuosité des vêtements rayés noir et blanc et brodés d’or confère au roi une solennité jusqu’alors inconnue[14]. Pourtant, l’image la plus diffusée du roi-chevalier n’est pas cette représentation majestueuse, mais sa variante plus sobre, descendante directe de l’esquisse au crayon de Jean Clouet[15]. Il en existe deux versions peintes au Louvre et à la Pinacothèque Malaspina de Pavie[16] : de dimensions inférieures au grand portrait, elles montrent le roi en buste, vêtu d’un pourpoint noir à petits crevés et d’une toque noire avec des échancrures. Les copies à la pierre noire et à la sanguine du dessin préparatoire de Clouet ouvrent les recueils de portraits constitués à partir de 1525 et très appréciés par la noblesse française, mais rien dans le traitement ou la mise en page ne distingue le portrait du souverain de ses officiers, sinon son superbe visage.
   Le nouveau portrait que François Ier commanda vers 1534 n’a pas connu de distribution aussi importante[17], ce qui ne fut pas le cas du portrait officiel, exécuté par François Clouet vers 1545 et connu d’après une copie du Louvre. Dans celui-ci comme dans tous les portraits posthumes, le visage vieilli du roi est associé à l’habit noir et blanc de 1524 qu’il ne portait plus depuis les années 1530, mais qui correspondait à l’image que l’on voulait se faire de François Ier[18].
   À son avènement, Henri II semble vouloir d’abord revenir à l’ancienne présentation de profil : les dessins originaux de François Clouet de 1547 et de 1550 sont non seulement des esquisses pour les médailles et les testons, mais également des propositions de portraits officiels[19]. En effet, plusieurs portraits peints se rattachent à ces crayons, représentant le roi le plus souvent en riche armure damasquinée dont on voit les traces sur les dessins. L’apparition de l’armure est par ailleurs un trait important dans le portrait royal du XVIe siècle. Cette tradition a pour origine le portrait équestre de Louis XII qui orne le premier des trois volumes de la Chronique d’Enguerrand de Monstrelet réalisés en 1510 pour François de Rochechouart[20], et qui sans doute influença Jean Clouet pour le portrait de François Ier à cheval, le premier d’une longue série de portraits équestres des rois de France. Néanmoins, les représentations en armure restent exceptionnelles avant Henri II qui aime se montrer en chef militaire victorieux.
   Henri II se fait représenter également en armure sur le portrait plus conventionnel le montrant de trois-quarts qu’il commande à Clouet peu après son avènement[21]. Reproduit exclusivement en miniature, ce dessin est pourtant à l’origine de l’iconographie officielle du roi de France qui s’établit vers 1553. À partir de cette date le roi multiplie ses représentations de trois-quarts en choisissant désormais un habit de cour. Mais si l’habit change, et que les cheveux gris et les cernes apparaissent, tous les portraits reprennent fidèlement les contours du visage du roi qui reste ainsi facilement identifiable. Le même principe sera appliqué aux représentations de François II et de Charles IX.
   Le dernier des portraits officiels de Henri II, en magnifique costume noir tracé de galons d’or, date de 1559, l’année même du tournoi fatale[22]. C’est ce portrait que Catherine de Médicis choisit pour diffuser le plus largement possible l’image de son défunt époux. Ainsi, en mai 1560, elle en envoie un à sa fille Élisabeth de Valois. La reine attache également une grande importance à la supervision de la représentation de ses enfants en combinant une large diffusion de portraits avec une réglementation stricte de la production, puisque seul le peintre attitré du roi est admis à peindre les princes. Une fois approuvé par la reine, le portrait fourni par l’artiste devient un modèle et peut être copié, mais toute reproduction nécessite toujours une permission de la reine ou du roi. Le 28 janvier 1571, l’envoyé de la reine d’Angleterre Walsingham écrit de Paris au comte de Leicester : « touchant les peintures que désirait votre Seigneurie, on ne peut en aucune façon se les procurer, car personne ne peut faire sans autorisation le portrait du roi ou de son frère ; la peine encourue est grande[23]. » Il ne s’agit pas de censurer l’image royale qui reste toujours « prise au vif » et n’est nullement idéalisée, mais d’éviter de mauvaises peintures et gravures qui défigurent le roi ou ses frères, blessant ainsi les sujets. Le fameux édit d’Élisabeth Ière de 1563, inspiré par le système français, parle ainsi de « plaintes des sujets affectionnés » arrivant chaque jour.
   Les enfants de France sont portraiturés la première fois à l’âge d’environ un an, à cause de la forte mortalité infantile. Ensuite Catherine commande au moins une fois par an de nouveaux portraits qui lui servent de bulletin de santé, mais qui sont également utilisés, surtout pour le dauphin François, comme esquisses de portraits officiels. Ainsi, le principe selon lequel le visage du roi change peu avec l’âge est appliqué aux les effigies du dauphin qui reprennent toujours les contours du portrait précédent : le visage reste quasiment le même entre le premier portrait connu de François, réalisé en 1547, et celui de 1558, exécuté à l’occasion de son mariage[24]. Ce dernier, largement inspiré par l’effigie de Henri II, devient l’image officielle du nouveau souverain.
   Le décès de François II provoque une grave crise monarchique et incite la reine mère à multiplier les représentations de la famille royale. Peu après le sacre du roi Charles, elle commande à François Clouet une série de portraits comprenant outre Charles IX, ses frères Anjou et Alençon et la petite Marguerite. Parmi eux, seuls subsistent des crayons représentant Charles et Henri, et ce fut le premier portrait connu de ce dernier [25]. Âgés de onze et dix ans, les deux enfants portent des habits similaires, bordés de fourrure, mais si le portrait du petit roi suit la tradition établie, celui de son frère semble se référer aux portraits plus anciens : Henri est tourné à droite et son regard est dirigé hors du cadre. On observe la même différence en comparant le dernier portrait du roi Charles et celui de Henri, exécutés la même année 1571[26].
   Dans ces deux portraits, le duc d’Anjou paraît pensif, introverti, presque triste, ce qui reflète le caractère du prince et non sa position de dauphin : François d’Alençon a, dans tous ses portraits, le regard dirigé vers le spectateur. Henri se présente en effet comme un prince double : parfait héros catholique après ses exploits à Jarnac et à Moncontour, il n’a rien d’un guerrier. S’attendant à voir un chef militaire victorieux, les ambassadeurs vénitiens expriment leur surprise devant ses riches habits couverts de broderies d’or et de pierreries du plus grand prix[27], néanmoins conquis par sa prestance, sa dignité et son intelligence. C’est cette même impression que donne le portrait de Henri.
   Ainsi, Élisabeth d’Angleterre qui reçoit, en juillet 1571, deux dessins représentant le duc d’Anjou en buste et en pied, trouve dans son visage « beaucoup de merques (
sic) de dignité et de prudence[28] », de sagesse et de grandeur. En 1572, les Polonais, qui s’apprêtent à élire leur nouveau souverain, sont conquis non pas par les harangues de Jean de Monluc, évêque de Valence, mais par les deux portraits du duc que celui-ci fait « porter en divers lieux », alors que circulent en Pologne des gravures montrant Henri en exécuteur cruel et sanglant de la Saint-Barthélemy, provoquant la colère des protestants[29]. L’image diffusée par Monluc convainc les Polonais que Henri serait un souverain tolérant, indépendant, accessible, ouvert et généreux.
   Pourtant, ce même portrait ne satisfait pas les Français, puisqu’il ne montre pas assez le caractère du jeune duc et ses qualités. Au début des années 1570, un courtisan inconnu écrit :
 
« Il a ce malheur que toutes les peintures lui font tort, & que Janet luy mesme ne luy a jamais donné cet admirable je ne sçay quoy qu’il a receu de la Nature. Ses yeux, cet agrément qu’il a autour de la bouche quand il parle, cette douceur avec laquelle il surprend ceux qui ont l’honneur de le voir en particulier ne peuvent estre bien representez ny par la plume, ny par le pinceau[30]. »
   La mort de Charles IX survient alors que Henri est en Pologne. En l’absence du successeur au trône c’est son portrait de 1571 qui est placé sur le lit du monarque mourant et présenté aux Français, mais à son retour Henri se rend compte de la nécessité d’une nouvelle image. Déchirée par les guerres civiles, la France a besoin d’un roi mûr, capable de réunifier les factions politiques. Dans une lettre du 8 août 1574 que Catherine de Médicis écrit à Philippe Hurault de Cheverny, chancelier de Henri, la reine expose un modèle de comportement, dont elle espère que son fils s’inspirera : le roi doit se démarquer de ses anciens compagnons, en développant « la gravité que Dieu lui ha doné de nature », car il doit « se monstrer mestre et non plus conpagnon, et décagé dé menteus[31] ». La jeunesse est en effet perçue comme un handicap majeur pour l’exercice légitime du pouvoir. Indocile, désordonnée, elle n’est pas considérée comme capable de sagesse. Lorsque Jean de La Taille brosse le portrait du prince dont la France a besoin, il dénonce la jeunesse du prince, qu’il oppose non pas à la vieillesse, mais à la sagesse : « Qu’il ne soit jamais jeune ; et s’il est jeune d’âge, / Que par livre il soit vieil[32]. » Charles IX n’a cessé de réactualiser son image, voulant toujours paraître plus âgé. Henri, bien qu’ayant un an de moins que son frère, était, au dire de tous, « meur comme ung homme parfaict » et semblait avoir presque trente ans.
   Dans sa lettre, la reine insiste également sur la radicale différence qui distingue le souverain de l’héritier de la Couronne et rappelle que le roi constitue le principe unificateur du royaume en portant à tous la même affection : « Qu’il ne montre poynt hayr personne, mès les aymer tous, pourveu que l’on lui rende l’aubéisance et tout cet qui lui apartient [...] »
   Henri est loin de ce modèle. Le légat du Saint-Siège, l’archevêque Claudio Cornelio Frangipani, se prononce ainsi sur la situation du royaume dans sa relation du 5 octobre 1574 :
 
« Le vrai et propre remède du mal de ce royaume serait un roi qui eût une valeur, qui comprît ce que c’est que d’être roi, qui voulût l’être ; et ainsi chacun serait remis à sa place. Ce qui ne se voit pas vraiment dans ce jeune homme, ni du côté de l’esprit, qui est porté à l’oisiveté et à la volupté, ni du côté du corps, faible et de mauvaise santé[33]. »
   En septembre de la même année, le roi est décrit par l’Espagnol Zuñiga comme un personnage de théâtre en représentation permanente, accoutré de façon extravagante, portant des vêtements de satin violet garnis de plissés, de crevés, de rubans, et affectionnant les accessoires tels que les boucles d’oreilles et les bracelets de corail[34].
   Le portrait du sacre de Henri III est d’une conception très traditionnelle : ses contours sont ceux du portrait de 1571, mais le visage du roi est vieilli et son regard tourné vers le spectateur. Cette représentation reste pourtant peu diffusée : elle est connue d’après un médaillon daté de 1575, un dessin montrant le roi en pied et armé, les tapisseries des Valois et le portrait équestre de Chantilly (copie postérieure d’un original perdu), le plus proche de la description donnée par l’ambassadeur espagnol[35]. Il est en effet difficile d’imaginer un habit plus étrange et criard que ce costume composé d’un pourpoint rayé or et vert, d’un collet (vêtement sans manches porté par-dessus le pourpoint) marron quadrillé d’argent, d’une cape noire, de haut-de-chausses cramoisi brodé d’or, de chausses vertes et de souliers blancs.
   La fin de l’année 1576 marque un changement radical dans la politique de Henri III, désireux de correspondre le mieux possible aux conceptions que se fait la reine mère de sa charge. Reprenant Frangipani, il veut être roi, mais choisissant désormais la paix et non la guerre, il veut être un roi prudent, sage et juste, unificateur du royaume, un père pour ses sujets. L’imaginaire du pouvoir est avant tout un imaginaire d’amour et de bienveillance. Le résumé de cette nouvelle politique d’apaisement se trouve dans l’harangue que le roi prononce le 6 décembre 1576, à la première séance des États Généraux de Blois :
 
« je n’ai autre plus grand désir et volonté que de faire vivre mes dits sujets en amitié, union et concorde les uns avec les autres, connaissant bien que de là dépend le salut de ce dit royaume et la restauration des choses que la malice du temps a perverties et altérées. [...] En cette intention, après avoir bien considéré les hasards et inconvénients qui étaient de tout côté à craindre, j’ai finalement pris la voie de douceur et réconciliation[36]. »
   Mais lors de ces États, le roi est également confronté aux monarchomaques qui prônent la souveraineté du peuple et l’obéissance conditionnelle, dont les théories conduisent à reconsidérer la sacralité même du souverain. Un abîme se creuse entre le corps immortel du roi et sa personne : le roi est désormais jugé en tant qu’individu avec ses qualités et défauts.
   Les mesures prises par Henri III visent à exalter la majesté du prince en radicalisant la distinction entre sa personne et l’ensemble de ses sujets. Dans le domaine de l’étiquette, le roi rompt avec la particularité française du souverain comme personnage public et familier : l’accès à sa personne est réduit, mais Henri reste abordable aux solliciteurs. Il se fait qualifier de « Majesté », prédicat auparavant donné au roi siégeant aux États ou tenant conseil[37]. Mais la plus grande modification concerne l’apparence même du monarque. 
   Le 16 décembre 1576, l’ambassadeur d’Angleterre exprimait sa surprise à Élisabeth après avoir vu le roi lors d’une séance des États tout vêtu de noir, avec un seul bijou sur sa cape. Le mois suivant, le 27 janvier, Louis de Gonzague consignait dans son Journal que le roi portait de nouveau des pendants d’oreille, « ce qu’il n’avait pas fait depuis plusieurs mois ». Henri n’en gardera ensuite qu’une seule perle, parfois accompagnée d’un « λ » (pour Louise). La tête du roi est désormais constamment couverte par une toque noire à aigrette et plumet,  posée haut sur la tête. Une miniature conservée aux Offices montre cette première étape de la transformation : l’habit de Henri III est sobre, mais orné encore d’une fraise énorme, ses cheveux sont frisés et remontés en arrière[38]. Peu après, la fraise cède la place à un simple col rabattu et le vêtement et la coiffure se simplifient.
   Un nouveau portrait traduit la politique royale de l’unification. Commandé par Henri III à Jean De Court ou à Étienne Dumonstier, il contient un véritable message politique, facilement perceptible et convaincant dont le roi lui-même est indiscutablement l’auteur[39]. Il ne s’agit plus d’une image royale, reflet de la fonction plus que de la personne, mais d’une représentation du roi en majesté. La distinction entre couronne et individu royal n’est pas abolie, mais l’homme commence à prendre une stature qui tend à l’élever au-dessus du commun des mortels, non seulement de par sa charge, mais aussi de par les qualités de son âme.
   Selon la doctrine catholique, le portrait d’un prince devait être respecté et magnifié, même si celui-ci n’était pas nécessairement un modèle de vertu[40]. Henri III veut se montrer en roi idéal. Ce n’est plus le visage qui le distingue de ses gentilshommes, mais son aspect tout entier. Le portrait qu’il commande reprend les contours de l’ancienne effigie, mais le roi en fait modifier certains traits, bien conscient de l’effet qu’il veut obtenir. Ainsi, à la demande du roi, ses yeux sont un peu plus ouverts et agrandis : le regard devient doux et bienveillant. La bouche perd cette expression un peu triste, sans pour autant afficher un sourire radieux, tellement en vogue dans les portraits de cette époque. Même si ce demi-sourire a malheureusement tendance à disparaître sur de mauvaises copies, le visage reste toujours plein de gravité, dignité et bienveillance.
   Ce portrait est délibérément archaïque jusque dans la technique employée et l’absence de l’estompe et du pastel, le rendant plus proche des œuvres des Clouet que des créations contemporaines des Dumonstier et des Quesnel. À l’instar des portraits de la première moitié du siècle, les épaules du roi sont toujours coupées par le cadre, ce qui donne à sa figure un port d’autant plus imposant.
   L’habit sobre du roi est toujours fidèlement reproduit, rapprochant le portrait de Henri III non pas à celui de Charles IX, mais à celui de Henri II dit le Grand, roi par excellence. Comme le vêtement tracé de galons de Henri II, ou l’habit noir et blanc de François Ier, le costume du dernier des Valois constitue son habit officiel, étroitement associé à l’image du roi. Sa simple évocation suffit pour identifier Henri, même si le visage perd toute ressemblance avec le souverain. Le collet noir va jusqu’à tenir presque lieu d’habit de sacre, souvent associé, dans les caricatures, à une couronne, qui n’est ordinairement portée qu’avec un habit de sacre fleurdelisé. Le roi fixe ainsi une représentation unique et exclusive de lui-même. La nouvelle version faite vers 1585 n’introduit pas de modifications notables : le roi est simplement plus âgé, il a la barbe grisonnante et moins de cheveux. Les portraits en buste, à mi-corps ou en pied reprennent inlassablement le même visage et les variations du costume se limitent à la forme du montage du diamant de l’aigrette et aux boutons du collet[41].
   Le roi attache une importance capitale à la diffusion de ce nouveau portrait, le faisant copier par ses artistes. Anne de Joyeuse dans sa lettre adressée à son grand-père explique ainsi le retard de l’envoi du portrait du roi : « le peintre qui les fet a tousiours deppuis esté empesché à d’autres que luy fairoit fere le roy, quy vit lors qu’on me bailla vostre lettre et comenda sur l’eure à son peintre d’en fere un grant en tableau pour metre en vostre chambre qu’il vous veut envoier de sa part[42]. » L’œuvre de l’artiste officiel est copiée et recopiée, souvent sans que l’autorisation soit nécessaire.
   En effet, le message contenu dans le portrait de Henri III séduit ses sujets qui se dépêchent de l’acquérir, non plus pour compléter leur galerie des rois de France ou des hommes illustres, mais pour posséder une représentation de leur souverain à mettre en valeur dans leurs demeures[43]. Dans un contexte de déchirement national, ce portrait permet aux nobles et bourgeois d’afficher leur appartenance à l’entourage du roi ou de témoigner de leur sujétion et de leur fidélité, voire de leur admiration. Presque tous les groupes de la société sont concernés, puisque Henri III est le premier des rois de France à utiliser la gravure, plus pratique que le crayon de par son faible coût et de la rapidité de production. Elle est de ce fait très appréciée par la bourgeoisie, alors que la noblesse préfère traditionnellement les portraits peints ou dessinés et les miniatures. Profitant de l’afflux à Paris de graveurs flamands spécialisés dans le portrait, le roi affiche une volonté de diffuser son image dans une population jusqu’alors peu concernée par ce genre destiné à une élite. L’essor de la caricature dans les années 1580 s’explique en grande partie par l’extraordinaire popularisation de l’image royale, celle-ci supposant au préalable d’être reconnue.
   Plus qu’un instrument de propagande, l’image officielle est une présence réelle du roi. Elle est en quelque sorte son double : près d’un siècle plus tard, dans le commentaire du portrait de Louis XIV de Charles Le Brun, Félibien écrit : « en votre personne et en votre portrait nous avons deux rois[44]. » Lorsqu’en 1589 les Mayenne s’approprient l’Hôtel de la Reine dans Paris révolté, ils commencent par enlever tous les portraits de Henri, alors que ceux de Catherine de Médicis restent en place. Aux Cordeliers, on efface la tête du roi, aux Jacobins on barbouille son visage. Avant le coup fatal de Jacques Clément, le meurtre du roi a également lieu en effigie : l’avocat Pierre Versoris est si affecté par l’assassinat du duc de Guise qu’il en meurt le lendemain de Noël ; avant de mourir, il aurait pris le portrait de Henri III et l’aurait mis en pièces en l’appelant « tyran », suivant la théorie des monarchomaques qui justifie le tyrannicide.
   Les graveurs proposent également des représentations martiales du roi de France, en armure et à cheval, modifiant ainsi son message pacifique. Thevet, pour ses Portraits des Hommes Illustres, commande un portrait de Henri armé et tête nue, conforme à sa fonction de chef militaire. Léonard Gaultier publie en 1580 une petite estampe montrant le roi à cheval et tenant un bâton de commandement, dont la composition dérive sans doute des portraits équestres des Valois, à la seule différence près que Henri y est lauré. L’image la plus étonnante sort de l’atelier de Robert Boissard vers 1586, représentant le dernier des Valois sur un champ de bataille, qui préfigure les portraits royaux du XVIIe siècle.
   Le pouvoir du portrait royal s’avère tel que de nombreux chefs de factions en manque de légitimité s’approprient la formule : après la mort de ses frères, Mayenne se fait représenter en habit sobre et noir avec un regard ouvert et le demi-sourire du roi, mais sans le bonnet à aigrette, associé définitivement à Henri III. Mais le véritable successeur de Henri III est Henri de Bourbon qui reprend toutes les composantes de l’image officielle de son cousin comme le costume noir et même l’aigrette que Navarre accroche à son chapeau de feutre. La suite logique du programme de Henri III est la représentation du roi en habit de sacre et couronné, voire dans un nuage, instaurant définitivement l’amalgame sacralisé de l’individu et de la fonction. Les représentations de Henri IV le glorifient et le divinisent : le message discret du dernier des Valois est mis en évidence dans le « divin pourtraict, plein de mille excellences et rempli de mille merveilles[45] ». Dès son installation en 1614, la statue de Henri IV est célébrée par un obscur théologien, Denis Le Conte, qui s’adresse au jeune Louis XIII et au peuple français. Pour son fils, Henri IV est l’image exemplaire du vainqueur, du pacificateur et du dominateur ; pour son peuple, le roi est à la fois Persée qui « avoit dompté et mis par terre le monstre de la Ligue, qui estoit prest de dévorer la France, cette pauvre Andromède », Alexandre, César et Mars ; il est tout-puissant maître du monde et des éléments, l’archétype de la vertu et l’arbitre de l’histoire[46].
  La création du nouveau portrait de Henri III à suscité de nombreuses commandes royales à ses peintres et graveurs, mais la qualité artistique lui importait peu et on ne peut pas véritablement parler ici de mécénat artistique. Il s’agit à la fois de mécénat « philosophique » et de mécénat politique qui perdura dans le temps, rendant possibles les glorieuses représentations des Bourbons. Le dernier des Valois transforme l’image royale statique des siècles précédents en y introduisant un message politique et humain. Henri III propose à ses sujets un type de portrait dont l’interprétation soit facile et évidente, se montrant en roi idéal, protecteur et pacificateur qui aime profondément ses sujets. On retrouvera sans doute le meilleur résumé de ce message – impensable sous les portraits de ses prédécesseurs – dans plusieurs estampes représentant le roi :
      Peintre afin que ton art imite la Nature
      Au tableau de ce Roy dont l’honneur touche aus Cieux
      Pein sur son chef Pallas, sur ses levres Mercure
      Mars dessus son visage, et l’Amour dans ses yeux.
NOTES

[1] BnF mss fr. 4538, f° 175 (publié par Henri Bouchot, « La préparation et la publication d’un livre illustré au XVIe siècle. 1573-1588 », Bibliothèque de l’École des chartes, LIII, 1892, pp. 612-623, p. 616). La lettre n’est pas signée (voir Jean-François Maillard, « De la maquette autographe à l’imprimé : La somptueuse et magnifique entrée du roi Henri III à Mantoue par Blaise de Vigenère (1576) »,dans Le Livre dans l’Europe de la Renaissance, actes du XXVIIIe Colloque international d’études humanistes de Tours (juillet 1985), Paris, Promodis, 1988, pp. 71-90, p. 82, n. 18). Le livre ne parut finalement qu’en 1579 : La Fondation faicte par mes seigneur et dame les duc et duchesse de Nivernois, princes de Mantoüe, contes de Rethelois et d’Auxerre, etc., pairs de France, pour marier doresnavant par chascun an à perpetuité en leurs terres et seigneuries jusques au nombre de soixante pauvres filles destituées de toutes facultez et moyens, s.l.
[2] Louis XII mit son portrait sur les monnaies de ses dépendances d’Asti (double ducat et ducat d’or, teston et demi-teston), de Milan (double ducat d’or, teston, gros royal), et de Naples (ducat d’or de 1501-1504). Dans le royaume, c’est par l’ordonnance du 6 avril 1514 que Louis XII décide la création du teston français avec son effigie (Jean Duplessy,
Les monnaies françaises royales de Hugues Capet à Louis XVI, Paris, Maastricht, Van der Dussen, 1988, I, p. 286 ; Pierre Lafolie, Les testons de Louis XII et de François Ier comme documents iconographiques, catalogue de l’exposition-concours de l’Hôtel des monnaies de Paris, Paris, imp. Nationale, 1951, p. 155).
[3] Louvre, inv. R.F. 3964 (huile sur bois, H. 0,660 ; L. 0,520) ; Versailles, inv. MV 3250 (huile sur bois, H. 0,300 ; L. 0,240).
[4] Abbé de Sauvigny,
Histoire d’Henri III, roi de France et de Pologne, Paris, Regnault, 1787.
[5] Josèphe Jacquiot, « L’iconographie et l’iconologie sous le règne du roi Henri III, roi de France et de Pologne d’après des médailles et des jetons », dans
Henri III et son temps, Actes du colloque international du Centre de la Renaissance de Tours, octobre 1989, Paris, J. Vrin, 1992, p. 141.
[6] Louvre, R.F. 2490 (tempera sur bois, H. 0,610 ; L. 0,410). Voir Jean-Baptiste de Vaivre, « Sur trois primitifs français du XIVe siècle et le portrait de Jean le Bon »,
Gazette des Beaux-Arts, t. XCVII, janvier 1981, p. 131-156.
[7] Louvre, inv. 9106 (huile sur bois, H. 0,988 ; L. 0,845 ; surface peinte : H. 0,860 ; L. 0,710). François Avril et al.,
Jean Fouquet, peintre et enlumineur, catalogue de l’exposition à la Bibliothèque Nationale de France, Paris, Hazan, 2003, n° 4, p. 101-110.
[8]  Malheureusement disparu, ce portrait montre le roi de profil à droite, portant une calotte de fourrure posée sur un bonnet et, au cou, l’ordre de Saint-Michel. Conservé à Fontainebleau, il est connu d’après une gravure de Jean Morin et celle de Jacques de Bie. Une copie fut faite par Gaignières (BnF Est. Oa 15, fol. 1) et des répliques sont conservées au château de Beauregard, au Musée Ariana à Genève, au Kunsthistorisches Museum de Vienne et au Brooklyn Museum of Art de New York.
[9] L’unique exception est un curieux portrait de Charles VIII dont la copie est conservée dans la collection Gaignières (BnF Est. Oa 15, fol. 53). Datant des années 1491-1495, il représente le roi coiffé d’une toque rouge surmontée d’une couronne impériale et portant un manteau brodé d’or et bordé d’hermine. Charles a un collier de l’ordre au cou et tient en mains les insignes impériaux : le glaive et le globe terrestre. Ce tableau fut sans doute peint pour flatter le projet du roi de se faire couronner empereur de Constantinople et de Trébizonde, les droits sur cet Empire étant abandonnés en sa faveur par André Paléologue.
[10] Le portrait de Charles VIII a disparu. La meilleure réplique est celle conservée dans une collection privée en Suisse (huile sur bois ; H. 0,370 ; L. 0,257). D’autres répliques sont conservées à Versailles (inv. MV 3101 ; huile sur bois ; H. 0,400 ; L. 0,320), à Chantilly et au château de Culan (Cher). Le portrait de Louis XII de Windsor (Royal Collection, H. 0,301 ; L. 0,203) est souvent considéré comme un original de Perréal, que semble confirmer la belle qualité du portrait et la présence de la main gauche du roi (découverte lors de la restauration), absente sur les toutes les copies contemporaines ou postérieures (Berlin, anc. coll. Lippmann ; Angers, Musée des Beaux-Arts ; coll. particulière, vente Steinmeyer, 1912). Il est pourtant difficile d’affirmer la parenté de l’artiste lyonnais, la plupart d’œuvres attribuables à Perréal étant des miniatures.
[11] Lettre des ambassadeurs vénitiens Venier, Pisani et Giutiniano, Paris, 14 février 1531 (citée par M. Smith, « Familiarité française et politesse italienne au XVIe siècle : les diplomates italiens juges des manières de la cour des Valois »,
Revue d’histoire diplomatique, CII, n° 3-4, 1988, p. 228).
[12] « Il re si trova di cinquantaquattre anni, d’una regia presenzia, talchè senz’altro sapere chi sia il re, e senza averlo veduto retratto, basteria ad ogni forestiero l’animo, vedendolo, dire : Questo è il re » (Niccolo Tommaseo,
Relations des ambassadeurs vénitiens sur les affaires de Paris au XVIe siècle, Paris, Imp. royale, 1838, I, p. 279).
[13] Chantilly, musée Condé, inv. 45/241 (huile sur bois, H. 0,350 ; L. 0,250).
[14] Paris, Louvre, Département de peinture, inv. 3256 (huile sur bois, H. 0,960 ; L. 0,740).
[15] Chantilly, musée Condé, inv. MN 1 (pierre noire et sanguine sur papier, H. 0,276 ; L. 0,197).
[16] Paris, Louvre, Département de peinture, inv. M.I. 832 (huile sur bois, H. 0,216 ; L. 0,168) ; Pavie, Musei civici dal Castello Visconteo, Pinacoteca Malaspina.
[17] Chantilly, musée Condé, inv. MN 2 (pierre noire et sanguine sur papier, H. 0,501 ; L. 0,408).
[18] Louvre, Département des Arts Graphiques, inv. 33530. Portraits rétrospectifs : Offices (miniature, inv. 1890, n° 4436), Chantilly (portrait équestre, inv. 63/270), Chambord (portrait en pied). Il est gravé pour les
Icones de Théodore de Bèze (Genève, 1581, p. 132) et pour les Portraits des Hommes illustres de Thevet (Paris, 1584, fol. 210 r°).
[19] Chantilly, musée Condé, inv. MN 29 (H. 0,342 ; L. 0,235) ; collection particulière (H. 0,329 ; L. 0,217).
[20] Enguerrand de Monstrelet,
Chroniques de France, Paris, BnF mss fr. 20360, fol. 1 v° (plume, encre brune et rehauts d’or sur vélin).
[21] Londres, The British Museum, Department of Prints and Drawings, inv. 1910-2-12-77.
[22] Saint-Pétersbourg, Ermitage, inv. 2992 ; Londres, British Museum, inv. 1859-5-14-277 ; Versailles, MV 3175 ; Paris, Louvre, inv. 3260, etc.
[23] « Touching the pictures tour Lorship desired, they can by no means be gotten, for no man may make any counterfeit of the King or his Brother, without license ; if he do, the punishment is great. » (lettre publiée par Dudly Digges,
The Compleat Ambassador or Two treaties of the intended marriage of queen Elisabeth of glorious memory comprised in letters on negotiation of Sir Francis Walsingham, Londres, G. Bedell and T. Collins, 1655, p. 30).
[24] Chantilly, musée Condé, inv. MN 32 ; Cambridge (Mass.), Fogg Art Museum, Harvard University, inv. 29.1971.
[25] Charles IX : collection privée et Cabinet des estampes (Na 22 rés., boîte 5, n° 5) ; Henri de France : Berlin, Staatliche Museen (Kupferstichkabinett, inv. KdZ 1459) et Cabinet des estampes (Na 22 rés., boîte 5, n° 4).
[26] BnF Est. Na 22 rés. boîte 5, n° 10 ; boîte 12, n° 7.
[27] Pierre Champion,
La Jeunesse d’Henri III, Paris, B. Grasset, 1941-1942, t. II, pp. 290 et 307.
[28] Bertrand de Salignac de La Mothe-Fénélon,
Correspondance diplomatique de Bertrand de Salignac de La Mothe-Fénélon, ambassadeur de France en Angleterre de 1568 à 1575, publiée par Charles Purton-Cooper, Londres-Paris, impr. de Danckon, 1838-1840, t. IV, p. 186.
[29] Jean Choisnin,
Mémoires, ou discours au vrai de tout ce qui s’est fait et passé pour l’entière négociation de l’élection du roi de Pologne, Paris, 1574, éd. Claude-Bernard Petitot, Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, t. XXXVIII, 1823, pp. 82-84.
[30] « Memoire d’une personne de condition, et des premieres de la Cour de France, donné au sieur de Walsingham, touchant Monsieur le Duc d’Anjou... », publié par Marin Le Roy de Gomberville,
Les mémoires de M. le duc de Nevers prince de Mantouë, pair de France, Paris, L. Billaine, 1665, p. 543. On a démontré que certaines lettres et relations imprimées dans cet ouvrage étaient des faux : voir G. de Brémond d’Ars, « Une question de critique historique. Pièces fausses des Mémoires de Nevers », Revue des questions historiques, XXXV, 1894, p. 226-235.
[31] BnF mss fr. 6625, f° 49 r° (
Lettres de Catherine de Médicis, éd. H. de La Ferrière et G. Baguenault de Puchesse, Paris, Impr. nationale, 1880-1909, t. V, p. 73-75).
[32] Jean de La Taille, « Le Prince nécessaire, Poème », in
Œuvres, éd. R. de Maulde La Clavière, Paris, L. Willem, 1878-1882, t. III, p. CIII-CIV.
[33
Tragedia del S. Cl. Cornelio Frangipani, al... invittissimo Henrico III, re di Francia e di Polonia... recitata nella sala del gran consiglio di Venetia, Venise, D. Farri, 1574.
[34] Pierre Champion,
Henri III roi de Pologne, Paris, B. Grasset, 1941-1953, t. II, p. 176 (22 septembre 1574).
[35] Paris, BnF Cabinet des médailles ; Paris, BnF Est. Na 22 rés. boîte 12, n° 10 ; Florence, Galerie des Offices, tapisseries « Réception des ambassadeurs polonais », « Le jeu de la quintaine » et « Fête nautique à Fontainebleau » (dans les tapisseries le costume est rajouté, seule la buste correspond au dessin perdu ; voir Frances Amelia Yates,
The Valois tapestries, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1975) ; Chantilly, musée Condé, inv. 66.
[36]
Recueil de pièces originales et authentiques concernant la tenue des États Généraux, Paris, Barrois l’aîné, 1789, II, p. 47.
[37] « Estant donc le Roy en tel estat et séant avec ses estats, on l’appelloit adonc la Majesté Royale [...]. Aussi est-il pour certain convenable, que là proprement on use de ce terme honorable de Royale majesté, lors que le Roy tient conseil, pour délibérer de l’estat de la chose publique : mais quelle apparence y a-t-il que ce soit que le Roy joue, soit il danse, soit qu’il babille avec des femmes, que cependant on ne l’appelle jamais autrement que Royale majesté, ainsi qu’on fait communément à la cour ? » (François Hotman,
Franco-gallia, 1573, éd. trad. française de 1574 par A. Leca, Presses universitaires d’Aix-Marseille, 1991, p. 108-109).
[38] Offices, inv. 1890 n° 4442. Cf. également le portrait de Henri III conservé au Muzeum Narodowe de Varsovie.
[39] Le dessin original est conservé au musée Condé de Chantilly (inv. MN 347), mais le portrait peint correspondant n’a pas survécu.
[40] Gabriele Paleotti,
Discorso intorno alle imagini sacre e profane, Bologne, 1582, livre II, chap. XVII et XVIII (éd. P. Barocchi, Scritti d’arte del Cinquecento, Milano, Naples, R. Ricciardi, 1975, t. II, pp. 306-317).
[41] La plupart des portraits conservés sont de médiocres copies, souvent postérieures. Paris, Musée du Louvre, inv. R.F. 3964 ; Versailles, inv. MV 3250 ; Chantilly, musée Condé, inv. 39/271, et 61/273 ; Varsovie, coll. Potocki ; Florence, Palais Pitti, n° 5722 ; Florence, Offices, Serie Gioviana n° 26 ; Le Mans, Musée de Tessé, inv. LM 10.46 ; Troyes, Musée des Beaux-Arts, inv. 849.1.1 ; Brescia, Pinacoteca Communale Tosio, sala II, 24 ; Azay-le-Rideau, château (XVIIe siècle) ; Beauregard, château ; Bussy-Rabutin, château. Les miniatures qui reprennent ce portrait sont toutes des médaillons contemporains au règne de Henri III : Heures de Catherine de Médicis (BnF mss nouv. acq. lat. 82, fos 109 r° et 122 r°, deux médaillons rajoutés probablement par Louise de Lorraine) ; New York, Metropolitan Museum of Art, inv. 24.80.512 ; Florence, Offices, inv. 1890, nos 5722 et 8879.
[42] BnF mss fr. 3316, f° 38.
[43] En dépouillant les inventaires après décès des bourgeois parisiens, Georges Wildenstein a dénombré dix portraits de François Ier, six de Henri II, un seul de François II, sept de Charles IX, mais quinze de Henri III, principalement en gravure, dont deux représentations à cheval. Parmi les bourgeois qui possèdent le portrait de Henri III, trois seulement ont également celui de Charles IX et un celui de Henri II. Par ailleurs, un seul inventaire mentionne un portrait du duc de Guise et deux celui du cardinal de Lorraine (« Le goût pour la peinture dans la bourgeoisie parisienne entre 1550 et 1610 »,
Gazette des Beaux-Arts, t. 33 bis, juillet-décembre 1951 (publiée en 1962), pp. 44-45).
[44] André Félibien,
Le Portrait du Roy, Paris, P. Le Petit, 1663 (dans André Félibien, Recueil de descriptions de peintures et d’autres ouvrages faits pour le Roy, Paris, Veuve de S. Mabre-Cramoisy, 1689, pp. 73).
[45] Denis Le Conte,
Météorologie ou l’excellence de la statuë de Henry le Grand eslevée sur le Pont-Neuf, Paris, J. Guerreau, 1614, p. 22.
[46] Ibid, pp. 16, 17, 19, 23, 26 et 27.