Artistes Index nominum Corneille de La Haye    
 
Corneille de LA HAYE dit Corneille de LYON
La Haye, vers 1510 – Lyon, 8 novembre 1575
n ignore la date de naissance et le véritable nom de Corneille de La Haye[1]. Ce nom « de La Haye » – sa ville natale – que l’on rencontre dans la plupart de documents le concernant entre 1533 à 1575, année de sa mort, remonte sans doute à l'époque de son installation en France et se transmit comme nom patronymique à ses descendants. Depuis le XIXe siècle et les travaux de Bouchot on a pris l’habitude de le désigner sous le nom de la ville de Lyon où il a vécu, sans que cela soit réellement justifié.
   Corneille est mentionné pour la première fois en 1533, lorsque Jean Second, jeune poète flamand, qui se rendait en Espagne pour y rejoindre en qualité de secrétaire l’archevêque de Tolède et ne trouvant pas de gîte dans un Lyon surpeuplé à l’occasion de l’entrée de la reine Eléonore (26 et 27 mai), rencontra par hasard deux de ses vieux amis, le poète Hilaire et le peintre Corneille. La date de sa venue en France et les raison de son séjour à Lyon n'y sont hélas pas évoquées. De même, ses relations avec Eléonore d'Autriche sont obscures, mais en 1534 il est qualifié de « painctre de la royne Helienor, royne de France » au dos du portrait de Pierre Aymeric, bourgeois lyonnais natif de Saint-Flour (Paris, musée du Louvre).
   Le talent du portraitiste flamand s'imposa rapidement, et Eustorge de Beaulieu adresse un rondeau « à la louange d’ung painctre de Flandre », publié en 1544, mais écrit durant les années 1536-1537 :
      « Pour bien tirer ung personnage au vif
      Ung painctre dict Cornylle est aloué
      N’avoir en France aucun comparatif. »
   Installé à Lyon, Corneille put profiter de longues visites de la cour, en 1533 et surtout en 1536, pour peindre les membres de la famille royale et les courtisans. Sans quitter sa ville, il devint « painctre de la maison de Monseigneur le Daulphin » Henri, ainsi que l’atteste une « certiffication des maistres d’hostelz » du dauphin de 1541, présentée aux consuls et échevins de la ville de Lyon en 1544. A l’avènement de Henri II il fut nommé peintre ordinaire et, en décembre 1547, naturalisé Français « en faveur des bons et agréables services qu’il lui a faict et faict chaque jour en son art et mestier » et « sans que pour ce il soit tenu [...] payer aulcune finance ou indempnité ». Corneille conserva le titre de peintre et valet de chambre du roi sous les règnes de François II et Charles IX, sans que jamais son nom n’apparaisse sur les états des officiers domestiques de la maison royale. Le fait qu’il ait appartenu à la religion réformée jusqu’en 1569 (le 2 décembre 1569, « Corneille de Laye painctre et sa femme et sa fille et serviteurs » sont déclarés « réduits », c’est-à-dire convertis au catholicisme) paraît ne pas avoir nui à son crédit, et l’ambassadeur vénitien Giovanni Vapelli vit, dans son atelier, « outre ses belles peintures », toute « la cour de France, tant les gentilshommes que les demoiselles, représentés en beaucoup de petits tableaux, avec tout le naturel imaginable ». Corneille jouit également de la faveur de Catherine de Médicis qui, en compagnie du duc de Nemours, gouverneur de Lyon, lui rend visite à son atelier en 1564 et admire son propre portrait, peint vraisemblablement en 1536. Le 25 décembre de la même année, elle lui fait accorder par son fils Charles IX, en vertu du droit d’aubaine, les biens d’un tisserand savoyard Pierre Breyssard, mort à Lyon pendant l’épidémie de peste de 1564, sans avoir été naturalisé. En 1574, l’année avant sa mort, le consulat confirme Corneille dans ses « privilleges, franchises et libertez, telles et semblables qui jouyssent les autres valletz de chambre et officiers domesticques de Sa Majesté ».
   Avant 1547, Corneille épousa Marguerite Fradin, fille de François Fradin, typographe lyonnais. Le 2 octobre 1550, il obtint la possession de « deux piés de maison » d’une part (une maison à deux corps avec une cour) et d’un « pié de maison » d’autre part, situés rue du Temple et appartenant aux Antonins, moyennant une rente annuelle et perpétuelle de 36 livres tournois et 3 sols de « servis annuel ». Outre ses deux maisons il possédait une troisième rue du Temple, dont il était propriétaire avant 1551, et une terre et une maison à Vénissieux (achetés en 1560). Marguerite Fradin mourut le 28 août 1575 et fut inhumée au couvent des Jacobins, dans le tombeau de son père. Corneille de La Haye ne tarda pas à la rejoindre et fut enseveli le 8 novembre 1575.
   Selon le testament que Marguerite fit en 1572, le couple eut six enfants, dont quatre filles (Clémence, Marguerite, Jane, Regne ou Renée) et deux fils, Jacques († 1632) et Christophe. Clémence épousa le peintre Jean Magnan ou Maignan. On ne sait pas si les autres ont été mariées, mais une d’elles pratiqua la peinture, et peignait « divinement bien »selon Antoine Du Verdier. Les fils de Corneille furent peintres, ainsi que ses petits-fils – les enfants de Christophe, Corneille et Simon-Pierre (1619-1677, peintre du roi de 1644 à 1650) – et ses arrière-petits-fils.
   On attribue à Corneille de La Haye une série de petits portraits peints sur bois, d’une exécution ferme, d’un coloris calme et doux, où les personnages se détachent sur les fonds bleus ou verts, rarement noirs. En revanche, on ne connaît aucun dessin de Corneille, bien qu’on lui donne actuellement le portrait au crayon de l’Albertina de Vienne, qui porte une inscription d’une écriture de XVII
e siècle identifiant le modèle comme étant Corneille lui-même : « Corneille de Lhaie Flament qui excelloit a fai[re] / des petits portraits au naturel, quon nomment Cornilla. »
[1] Pour Corneille de La Haye, voir : Anne Dubois De Groër, Corneille La Haye dit Corneille de Lyon,Paris, ARTHENA, 1997.